Médicaments : Macron relocalise aux frais du contribuable
Santé Le président de la République a annoncé que 50 médicaments essentiels, pour lesquels notre dépendance est avérée, allaient être entièrement relocalisés en France. Une manière de soigner son image de «monsieur Souveraineté industrielle».
Une bonne dose d’autocélébration, quelques formules chocs et des promesses en pagaille. Mardi, en visite à Champagne (Ardèche), sur le site du laboratoire français Aguettant, Emmanuel Macron a fait… du Emmanuel Macron. L’ancien chantre du laisser-faire cherche à convaincre qu’il embrasse désormais la cause de la souveraineté industrielle.« La réindustrialisation, ce n’est pas un concept, a-t-il martelé. Elle est à l’œuvre, parce que nous avons fait des réformes. »
Le chef de l’État a promis de créer une liste de 450 médicaments« essentiels pour traiter nos concitoyens »,pour lesquels il faudra sécuriser l’approvisionnement, afin de ne pas revivre les tensions de ces derniers mois. En effet, il est très difficile dans de nombreuses pharmacies de se procurer du paracétamol ou de l’amoxicilline (antibiotique utilisé contre plusieurs infections). La« sécurisation »promise par Emmanuel Macron devra se faire sous deux formes : relocalisation totale ou diversification de l’approvisionnement.
Un investissement de 160 millions d’euros
Parmi ces 450 médicaments, 50 vont faire l’objet de mesures de relocalisation, dont la moitié à très court terme, jure le chef de l’État.« Dans les semaines à venir, sur la cinquantaine de médicaments essentiels pour lesquels notre dépendance aux importations extra-européennes est avérée, 25 verront leur production relocalisée ou augmentée significativement sur le territoire national »,assure-t-il. Si les modalités pratiques ne sont pas connues, une chose est sûre : l’État va mettre la main à la poche.« Huit nouveaux projets de relocalisation soutenus par l’État, via France 2030, pour un investissement total de 160 millions d’euros »,vont être lancés, selon Emmanuel Macron. Ce dernier a notamment évoqué le« midazolam, essentiel pour nos produits d’anesthésie-réanimation »,l’amoxicilline et six anticancéreux.
80 % des principes actifs viennent d’Asie
Les annonces ont été accueillies avec scepticisme.« Relocaliser des médicaments frappés de pénurie, c’est une bonne chose,admet l’économiste Nathalie Coutinet.Le problème, c’est l’argent public mis sur la table… »C’est un euphémisme. Pendant des années, les groupes pharmaceutiques ont délocalisé à tour de bras, pour des raisons purement financières, ce qui explique en partie les pénuries dont s’offusque Emmanuel Macron : 80 % des principes actifs sont fabriqués en Asie.« Et, aujourd’hui, il faudrait que l’État finance la relocalisation,s’agace l’économiste.Est-ce que GSK, qui est sur la liste des bénéficiaires ciblés par l’Élysée, a vraiment besoin d’argent ? »On en doute, au vu des 17 milliards d’euros de bénéfices engrangés par le groupe britannique en 2022.
« En 2020, par l’intermédiaire de France Relance, l’État a déjà donné 200 millions d’euros à l’industrie pharmaceutique,rappelle Jean-Louis Peyren, coordinateur CGT chez Sanofi.Jusqu’à quand va-t-on continuer de subventionner des entreprises privées qui détruisent de l’emploi ? »Le syndicaliste a calculé que 700 postes devraient être supprimés par Sanofi d’ici à 2025… Pourtant, le laboratoire a été chaleureusement félicité par le président de la République, pour ses investissements réalisés dans l’Hexagone.
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