Logement,
un échec français
Plus
de 4 millions de personnes sont mal logées en France, selon le
dernier rapport de la Fondation Abbé-Pierre publié ce 1er février
2023.
On
aborde toujours le dossier du logement par le mauvais bout,
c’est-à-dire par les statistiques. Avant de se pencher sur les
chiffres, il est important de se représenter les situations
humaines. Les familles, les mères isolées, les enfants, les
personnes âgées, les migrants. Les pièces surpeuplées, le mauvais
sommeil, la crasse, les odeurs, le froid. Les fins de mois
impossibles, les huissiers. La rue. Alors seulement, on peut
commencer à se pencher sur le
dernier rapport de la Fondation Abbé-Pierre,
rendu comme chaque année le 1er février, jour anniversaire de
l’appel de l’hiver 1954. Qu’y lit-on ? Que l’on compte en
France 4,1 millions de personnes mal logées. Et qu’on estime à
330 000 le nombre de personnes sans domicile, soit plus du double
qu’en 2012.
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Fondation Abbé-Pierre appelle le gouvernement à « faire du
logement une priorité »
On
peut certes se désoler de politiques publiques à courte vue ou trop
souvent incantatoires. Mais cet échec n’est pas uniquement celui
des gouvernements successifs. Il est celui de toute la communauté
nationale. Il semble que nous souffrions d’une forme collective
d’accoutumance. Comme si nous prenions le mal-logement pour une
donnée, un état de fait contre lequel on ne pourrait rien. Comme si
par exemple il n’y avait pas en France plus de 3 millions de
logements vacants, dont plus de 100
000 directement habitables.
Comme s’il était impossible d’orienter davantage l’énorme
quantité d’épargne disponible vers la construction. Quand la
Fondation Abbé-Pierre appelle à la « mobilisation générale »,
il ne s’agit pas d’un slogan : des particuliers aux associations,
des bailleurs professionnels aux pouvoirs publics, tout le monde doit
agir à son échelle. C’est à cette seule condition que la France
peut espérer sortir un jour d’une forme de culture du
mal-logement.
Fondation
Abbé-Pierre : le nombre de personnes sans domicile a doublé en
dix ans
Les
faits
Selon
le rapport annuel de la Fondation Abbé-Pierre publié mercredi
1er février, 330 000 personnes sont sans domicile en
France, un nombre qui a plus que doublé en dix ans. Plus de
4 millions de personnes sont mal-logées, selon la même
évaluation.
Sans abri, en hébergement d’urgence ou en centre pour demandeurs d’asile, les personnes sans domicile ont vu leur nombre augmenter de près de 130 % depuis 2012, date de la dernière étude de l’Insee à ce sujet, estime la fondation. « C’est encore une estimation assez conservatrice », a assuré lors d’une présentation à la presse le directeur des études de la fondation, Manuel Domergue.
Au total, 4,15 millions de personnes sont mal-logées, estime la fondation, qui calcule ce nombre à partir d’une enquête de l’Insee de 2013. Dans cette catégorie sont comptabilisées les personnes en hébergement contraint chez des tiers (y compris leur famille, pour les plus de 25 ans), ainsi que celles vivant dans un lieu beaucoup trop petit ou privé du confort de base (cuisine, toilettes, chauffage…). Une large part des « gens du voyage », subissant de mauvaises conditions d’habitat, entre également dans cette catégorie.
12 millions de personnes en situation de fragilité
Le « halo » du mal-logement, qui regroupe les situations de fragilité comme la précarité énergétique ou les impayés de loyer, concerne 12,1 millions de personnes, selon les calculs de la FAP à partir de données de 2013.
On y trouve les ménages « appauvris par des niveaux de loyer insoutenables », les personnes ayant eu froid chez elles faute d’avoir les moyens de se chauffer, celles obligées de vivre dans un logement trop petit, les locataires avec des impayés et les propriétaires dans une copropriété en difficulté.